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Les gestes démodés

Dans le monde des relations publiques, notre travail est de plus en plus porté sur les communications numériques. Même la lecture des journaux se fait maintenant à l’ordinateur ou sur une tablette. Les textes, et les idées qu’ils contiennent, se dissipent aussitôt lus… et partagés sur Facebook.

Heureusement qu’à d’autres moments, des gestes personnels et quelque peu démodés nous ramènent dans l’organique et le durable. Des gestes qui nous rappellent que les écrits devraient normalement rester et non pas se dissoudre dans le cyberespace.

Mia, notre graphiste, a récemment fait livrer une boîte de documents en prévision d’une conférence que nous donnions le lendemain chez un client. En ouvrant la boîte, j’ai découvert sur le dessus une petite note écrite à la main : « Bonne présentation! » Cette petite attention, toute simple, m’a beaucoup impressionné et m’a fait penser à ce que Seth Godin avait appelé, en septembre 2012,  « The simple power of one a day ». Dans ce billet, il dresse une liste de gestes semblables qui font de nous de meilleurs communicateurs.

CartePostaleOn reçoit tellement de messages numériques sur Facebook, par Twitter ou par courriel, qu’une carte avec un mot écrit à la main devient une espèce de trésor dont on ne veut plus se départir. N’est-il pas vrai qu’il n’y a rien de plus magique qu’une carte postale (même la plus criarde d’entre elles), qui met certes des semaines à nous parvenir, mais qui reste ensuite aimantée sur notre frigo pendant des mois?

En 2012, l’histoire d’une bouteille lancée à la mer en Gaspésie par deux adolescentes et qui traverse l’océan pour aboutir sur une plage en Irlande, huit ans plus tard, nous a émus et a fait le tour du monde.

Quand je suis venu signer mon dernier contrat d’embauche, j’ai été séduit par un geste du même ordre. Je patientais dans la salle de conférence et j’entendais au loin la directrice-générale demander à la ronde : «Qui a vu mon beau stylo»? Sortir son plus beau stylo pour la signature d’un contrat, c’est souligner l’importance du moment. Qui n’aime pas se sentir spécial?

Bien peu d’entre nous s’adonnent encore aux beaux stylos et aux cartes soigneusement calligraphiées. Or, à l’ère du web 2.0, ces gestes démodés ont plus de saveur et d’impact que jamais. La rareté créé la valeur.

© Eric Barbeau / BARBEAU-IMAGES

Crépuscule d’automne

J’ai immortalisé ce moment d’intimité il y a exactement 20 ans, au cours d’une promenade d’automne sur la plage de Kitsilano. Je ne les connaissais pas; je ne leur ai jamais parlé. Je me souviens d’avoir été touché par la scène: deux tourtereaux âgés admirant le coucher de soleil, en retrait de l’agitation du centre-ville, loin derrière.

Quand j’ai fait cette image en octobre 1993, j’imaginais un très vieux couple. Je les sentais unis par les souvenirs d’une longue vie à deux, émus par les chaudes lumières de l’automne, moments bouleversants marquant la fin du jour, la fin de l’été, voire la fin de leur vie.

Bien des crépuscules ont eu lieu depuis cette image, que j’ai retrouvée il y a quelques semaines à peine. Je voulais offrir cette photo en cadeau, pour symboliser l’amour qui dure. Signe des temps: je n’ai pas eu le temps d’en faire un tirage que le présent symbolique était déjà devenu désuet et non pertinent. Le fichier traîne sur le desktop de mon ordinateur depuis.

En réfléchissant à la volatilité amoureuse qui caractérise notre époque, je me suis surpris à penser qu’au fond, mes perceptions -vos perceptions?- peuvent être déformées par les normes et les clichés. Les tourtereaux de Kits Beach venaient peut-être à peine de se rencontrer quand je les ai photographiés. Et si c’était l’émotion d’un nouveau début qui les captivait tant quand la lentille de mon vieux Yashica a croisé leurs silhouettes voûtées? Et si la grande force de cette image ne résidait pas tant dans une incarnation de la résilience amoureuse, mais plutôt parce qu’elle représente l’espoir des commencements, même quand on est vieux? Et si…?

Et si, parfois, les crépuscules étaient des aubes?