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© Eric Barbeau / BARBEAU-IMAGES

Crépuscule d’automne

J’ai immortalisé ce moment d’intimité il y a exactement 20 ans, au cours d’une promenade d’automne sur la plage de Kitsilano. Je ne les connaissais pas; je ne leur ai jamais parlé. Je me souviens d’avoir été touché par la scène: deux tourtereaux âgés admirant le coucher de soleil, en retrait de l’agitation du centre-ville, loin derrière.

Quand j’ai fait cette image en octobre 1993, j’imaginais un très vieux couple. Je les sentais unis par les souvenirs d’une longue vie à deux, émus par les chaudes lumières de l’automne, moments bouleversants marquant la fin du jour, la fin de l’été, voire la fin de leur vie.

Bien des crépuscules ont eu lieu depuis cette image, que j’ai retrouvée il y a quelques semaines à peine. Je voulais offrir cette photo en cadeau, pour symboliser l’amour qui dure. Signe des temps: je n’ai pas eu le temps d’en faire un tirage que le présent symbolique était déjà devenu désuet et non pertinent. Le fichier traîne sur le desktop de mon ordinateur depuis.

En réfléchissant à la volatilité amoureuse qui caractérise notre époque, je me suis surpris à penser qu’au fond, mes perceptions -vos perceptions?- peuvent être déformées par les normes et les clichés. Les tourtereaux de Kits Beach venaient peut-être à peine de se rencontrer quand je les ai photographiés. Et si c’était l’émotion d’un nouveau début qui les captivait tant quand la lentille de mon vieux Yashica a croisé leurs silhouettes voûtées? Et si la grande force de cette image ne résidait pas tant dans une incarnation de la résilience amoureuse, mais plutôt parce qu’elle représente l’espoir des commencements, même quand on est vieux? Et si…?

Et si, parfois, les crépuscules étaient des aubes?

Barbeau-Images

Barbeau-Images (2000-2005)L’idée de lancer ma propre entreprise de photojournalisme est née lors d’un voyage en Équateur en 1999. Les images de la crise des autochtones Qechua que je rapportais chez moi méritaient d’être vues; l’histoire de ce petit pays d’Amérique du Sud méritait d’être racontée et partagée. L’arrivée de l’internet permettait de numériser les négatifs et de faire circuler les images partout dans le monde.

L’aventure photo a duré cinq ans à partir de ce 12 janvier 2000, date à laquelle Le Devoir a publié ma photo équatorienne. J’ai fait une multitude de premières pages par la suite, publié dans des publications prestigieuses comme l’Actualité, La Presse, Québec Science, Philadelphia Inquirer. J’ai voyagé en faisant des images, notamment en Haĩti où je suis retourné en 2004 comme photographe de presse. Mon reportage-photo dans le magazine de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec était finaliste aux Grands prix du magazine québécois en 2005.

L’arrivée des appareils numériques performants vers 2003-2004 a complètement tué le modèle des agences de stock (ou images d’archive). La prolifération d’images gratuites rendait les banques d’images non viables. En 2005, j’ai confié mes droits à l’Agence Alpha-Presse.

À mon retour d’Haïti en 2004, j’ai aussi été souvent invité comme conférencier dans les clubs photo pour parler du journalisme par l’image.